Mahmoud Ali Youssouf : "Djibouti est un pilier stratégique de la coopération sino-africaine"
Ce lundi, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Mahmoud Ali Youssouf, a pris la parole devant un parterre de journalistes pour dévoiler les nouvelles perspectives d'une coopération sino-djiboutienne en pleine mutation. Le ministre, habile orateur, a esquissé les contours d’une relation historique qui, loin de se limiter à une simple alliance diplomatique, s’impose désormais comme un partenariat d’envergure mondiale.
D’emblée, Mahmoud Ali Youssouf a rappelé la place unique de Djibouti dans le concert des nations africaines : un carrefour, une passerelle naturelle entre l’Orient et l’Afrique, là où les routes commerciales s’entrecroisent. Au cœur de ce dessein, la Chine.
Le Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), institution en place depuis 24 ans, a été l'occasion pour la Chine d'annoncer des engagements financiers d'une ampleur inédite : 50 milliards de dollars, dont 29 milliards en prêts pour des infrastructures, 11 milliards en dons pour des secteurs cruciaux, et 10 milliards pour inciter les entreprises chinoises à investir sur le continent africain.
Depuis des décennies, ce géant asiatique a fait de Djibouti un pilier central de sa politique africaine, dans le cadre de l’ambitieuse initiative Une ceinture, une route. Ce projet titanesque voit en Djibouti non seulement un point d’ancrage stratégique, mais aussi une porte d’entrée vers un continent aux promesses incommensurables.
Le ministre, dans un style alliant conviction et précision, a énuméré les réalisations concrètes issues de cette coopération : du chemin de fer reliant Addis-Abeba à Djibouti aux infrastructures portuaires de Doraleh et Damerjog. Autant de projets qui, aujourd’hui, font de Djibouti un nœud logistique essentiel en Afrique de l’Est, mais aussi une plateforme incontournable dans l’échiquier commercial mondial.
Si l'économie domine souvent les relations internationales, Mahmoud Ali Youssouf n’a pas manqué d’aborder les aspects militaires du partenariat, en particulier la présence de la base logistique navale chinoise à Djibouti. Ce partenariat, unique en Afrique, a été signé en 2015 pour une durée de dix ans et est aujourd’hui en phase de renégociation. La nature de ces discussions ? Redéfinir les termes de la coopération pour les dix, voire vingt années à venir, dans un contexte où la lutte contre le terrorisme et la piraterie maritime reste une priorité partagée.
Nous sommes les seuls en Afrique à entretenir avec la Chine un partenariat aussi spécifique, a précisé le ministre avec une fierté non dissimulée.
L'avenir du port de Tadjourah
Alors que des rumeurs persistantes circulaient sur l’avenir du port de Tadjourah, le ministre Mahmoud Ali Youssouf a tenu à rétablir la vérité avec l'autorité qui le caractérise depuis des années. Le port de Tadjourah ne sera ni cédé ni vendu, a-t-il affirmé, coupant court aux spéculations.
Cependant, Mahmoud Ali Youssouf n’a pas caché les défis qui entourent ce port. Actuellement, un seul navire y accoste tous les deux mois. Mais plutôt que de céder au fatalisme, le ministre a dévoilé une approche novatrice : une co-gestion avec l’Ethiopie. Inspirée du modèle de gestion binationale du chemin de fer, cette proposition viserait à faire du port de Tadjourah un axe clé pour les régions éthiopiennes du nord. Une synergie qui pourrait transformer Tadjourah en un véritable hub, tout en apportant une solution durable aux défis logistiques régionaux.
Mais au-delà du port de Tadjourah, c’est l’ensemble des infrastructures portuaires djiboutiennes qui est au centre d’une stratégie de développement bien réfléchie. La concurrence est rude dans la région, a admis Mahmoud Ali Youssouf, soulignant l’importance pour Djibouti de diversifier ses partenariats afin de maintenir son avance dans un environnement en perpétuelle mutation.
Conscient de la concurrence régionale croissante, notre pays sait qu’il ne peut se contenter d’entretenir ses acquis. Il doit innover, diversifier ses partenariats et surtout rester fidèle à la vision du président Ismaïl Omar Guelleh : faire de Djibouti non seulement un hub logistique, mais aussi un centre financier et numérique de premier plan en Afrique, a-t-il affirmé.
En filigrane de cette conférence de presse, une certitude : Djibouti, bien que petit par sa taille, joue dans la cour des grands. Grâce à une diplomatie audacieuse, notre pays, à la croisée des chemins, ne cesse de renforcer ses atouts avec finesse et pragmatisme. Ainsi, l’histoire est en marche, et Djibouti en est un acteur incontournable.